Un raccourci un peu rapide

On en parlait déjà il y a deux ans, mais l'argument des buralistes reste le même : "pourquoi interdire de fumer là où on vend du tabac ?". C'est ce qu'ils proclament dans une affiche collée sur leur devanture⁽¹⁾.

Mais je ne comprends toujours pas le lien géographique qu'il y a entre vendre du tabac et fumer du tabac : acheter et consommer sont deux actes différents. Je propose aux pharmaciens qu'ils mettent des affiches : "Les pharmaciens soutiennent la politique de santé publique. Mais pourquoi ne pas laisser la liberté de se déculotter là où l'Etat fait vendre des suppositoires ?" Après tout, ce n'est pas plus idiot.

Une autre de leur proposition consiste à dire "laissez les commerçants choisir s'ils veulent ou pas interdire de fumer dans leur établissement". Idée inspirée par l'exemple espagnol où effectivement, chaque restaurant ou café de moins de 120 m2 indique sur sa porte si le lieu est fumeur ou non. Nous étions à Barcelone il y a peu : à part un salon de thé et une cafétéria, nous n'avons vu que des restaurants et des cafés fumeurs. Belle réussite !

Par contre, sur les sites des buralistes, il n'y a pas un mot sur la santé de leur personnel qui travaille 8 heures par jour dans la fumée du tabac.

On trouve cependant des perles amusantes sur ces sites : comme ce sondage commandé par la fédération des buralistes et qui montre que suite à l'interdiction de fumer, 85% des sondés ne changeront pas leurs habitudes, 7% iront plus souvent dans les bars-tabac et 7% iront moins souvent.

On y apprend également que 77% des sondés ne vont jamais manger dans un bar-tabac et que 52% ne vont jamais y prendre une consommation. Il y aura donc, suite à l'interdiction de fumer, une clientèle à attirer. Au lieu de réclamer des dédommagements, il suffit d'un peu d'imagination. Surtout que 69% des fumeurs sondés n'auront aucune hésitation à prendre une consommation ou prendre un repas dans ce lieu désormais sans fumée. Ceci n'empêche pas l'édito du site de prédire une catastrophe économique : "Alors que les conséquences réelles et profondes sur le comportement des consommateurs de la dernière hausse du tabac ne sont pas encore connues" ou "nous savons pertinemment qu’il se traduira par des dégâts considérables pour les bars-tabacs. Il suffit de demander aux fumeurs s’ils continueront à prendre leur café et à lire le journal au zinc le matin…" en complète contradiction avec les résultats du sondage qu'ils ont eux-même demandé.

⁽¹⁾ : Remarquez en passant la tournure "où l'Etat fait vendre" qui leur retire un peu de responsabilité puisque quelque part, ils sont obligés de vendre du tabac contre leur volonté.