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Esprit du vinaigre
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4 novembre 2005

Vous reprendrez bien un peu de fumée

Devant la menace d'une interdiction totale de fumer dans les restaurants, le patron de de l'Union des métiers et des industries de l'hôtellerie devient le plus fervent défenseur de la loi Evin : "Nous, on prône une application stricte de la loi Evin. Cela laisse leurs prérogatives aux patrons, en charge de la faire respecter. On est pour la responsabilisation des gens, pas pour leur caporalisation."

La loi Evin a été votée en 1991 et environ 60% des établissements représentés par ce monsieur ne respectent pas la loi. Et d'un coup, comme ça, il prone la responsabilisation des patrons de restaurants pour mettre aux normes leur établissement alors qu'ils ne l'ont pas fait depuis 15 ans ! Personnellement, je trouve la ficelle un peu grosse.

"Mais il y aura deux fois moins de fumée, si les zones sont respectées." ajoute-t-il. D'une part, deux fois moins de fumée, c'est quand même toujours de la fumée et d'autre part, tout est dans ce "si".
La loi Evin a été retournée : son texte indiquait clairement qu"il est interdit de fumer dans les lieux affectés à un usage collectif, notamment scolaire, et dans les moyens de transports collectifs, sauf dans les emplacements réservés aux fumeurs." Parce que dans les faits, c'est l'inverse : des zones non-fumeurs sont vaguement aménagées parmi un espace fumeur(1).
En théorie, les petits bars ou restaurants qui ne permettent pas la séparation entre les deux zones devraient être non-fumeurs. En pratique, le patron vous explique que désolé, mais il ne peut pas faire un coin non-fumeur et que si la fumée vous gêne, vous devez changer de restaurant. Mais promis, juré, maintenant, les patrons vont être res-pon-sa-bi-li-sés.

Quant au patron des buralistes, il évoque la spécificité du bar-tabac français pour décréter qu'une interdiction est impossible en France alors qu'elle l'est en Irlande, en Norvège, en Italie, ... Je ne comprends pas bien l'argument : ce n'est pas parce qu'on peut acheter du tabac dans certains bars qu'on est obligé de le consommer sur place ; quand je fais à la pharmacie, en général je rentre chez moi avant de prendre les médicaments. Il me semble que dans les bars-tabac, le comptoir où les gens achètent leurs cigarettes n'est pas celui où ils les consomment.

Cette semaine, un député UMP a tenté de faire passer une loi pronant l'interdiction totale de fumer dans les lieux publics couverts. Son groupe parlementaire ne lui a même pas accordé le droit de déposer cette loi. Combat d'arrière-garde que celui de ces députés : 56% des fumeurs et 88% des non-fumeurs seraient d'accord avec une interdiction totale. Elle est déjà appliquée dans les cinémas, les bus, les métros, les trains, les avions, ... Et la Cour de Cassation indique qu'il existe une obligation de résultat pour les entreprises en matière de protection de leurs salariés face aux risques liés au tabagisme passif. Ce qui inclut bien sûr les employés des bars, des restaurants et des discothèques qui travaillent dans une atmosphère enfumée(2).

Le Ministre de la Santé a indiqué que "le status quo n'est plus possible" et a promis de se pencher sur le problème après la remise d'un n-ième rapport, mais peut être pas avant les élections présidentielles.

En attendant, il faut encore essayer de deviner le goût et l'odeur des aliments servis au restaurant sous l'odeur âcre de la cigarette. Question : puisque le droit d'asphyxier ses voisins est admis, est-ce que je peux amener des boules puantes au restaurant ?

(1) Etude de législation comparée n°142, Sénat, janvier 2005
(2) Aux Pays-Bas où il est interdit de fumer dans les lieux publics, les restaurateurs ont obtenu une dérogation en contrepartie de l'engagement à introduire volontairement une limitation progressive de la consommation de tabac dans leurs établissements. Je ne sais pas depuis combien de temps la "limitation progressive" est en vigueur, mais pour l'instant, on a l'impression qu'elle en est au point zéro.

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Commentaires
A
@isido<br /> Le débat ne situe pas sur le plan de la morale, mais sur celui du respect de la loi, et de l'évolution probable de celle-ci. De plus, on ne parle pas ici des fumeurs et des non-fumeurs, mais des responsabilités des politiques et des responsables de syndicats professionnels.<br /> <br /> Mais on peut aussi aborder le sujet sous l'angle des comportements. La nature humaine est ainsi faite que nous ne savons pas spontanément nous imposer des barrières : par exemple, en plus des actions pédagogiques, il faut des limitations de vitesse, des radars et des amendes, il faut des taux max d'alcoolémie, des contrôles et des amendes pour que nous acceptions de rouler pas trop vite et pas trop bourrés(1), donc de respecter les autres usagers de la route.<br /> <br /> Les restaurants étant, de facto, des endroits où il permis de fumer, il est donc tout à fait normal que certains clients y fument. Et en vertu du principe de non-spontanéité des contraintes énoncé ci-dessus, il est tout à fait normal que les fumeurs ne se soucient pas des autres usagers du restaurant, puisqu'ils se basent sur le principe que la loi leur donne le droit de fumer et protège les non-fumeurs.<br /> <br /> Sauf que dans la majorité des cas, les restaurants n'ont qu'une seule salle et que malgré tous les dispositifs de ventilation (quand ils existent et qu'ils fonctionnent), la zone non-fumeur est toujours plus ou moins enfumée. Et toujours sans jugement moral : <br /> a) il est extrêmement difficile pour un fumeur d'imaginer à quel point sa fumée peut être dérangeante et nauséabonde pour bon nombre de non-fumeurs.<br /> b) le fumeur considère que c'est de la responsabilité du patron du restaurant de faire en sorte que sa propre fumée n'incommode pas les non-fumeurs.<br /> <br /> Mais, cette attitude n'est pas propre aux fumeurs : elle est inhérente à notre nature humaine. Malheureusement, il n'y a que la contrainte forte (couplée avec des explications) qui permet de faire changer les comportements.<br /> <br /> On peut également aborder ce problème sous l'aspect de la santé publique. Quel est l'impact des zones fumeurs sur les non-fumeurs, en particulier tout le personnel de salle qui travaille dans une ambiance enfumée ? Quand j'étais fumeur, il ne m'est jamais venu à l'esprit que les serveurs des restos où j'allais tous les midis se bouffaient de la fumée 8 heures par jour.<br /> <br /> Et enfin, on peut aborder le problème sur le plan des finances publiques avec un Etat partagé entre des recettes de taxes sur les tabac et des dépenses de santé.<br /> <br /> Tu vois, le débat est beaucoup plus complexe qu'une simple réflexion sur les méchants et les gentils ...<br /> <br /> (1) Du moins la grande majorité d'entre nous :)
I
Fumeur = méchant<br /> Non-fumeur = gentil<br /> <br /> Un peu réducteur, non ?
P
et si on arrêtait d'en vendre?
C
6 mois (et 1 jour) après arreté la clope, OUI à l'interdiction TOTALE de la clope, du "démissonage " complet de la classe politique (qui cautionne une drogue dure) et du 'tapage sur les doigts' des patrons qui font du 'faites ce que je dis, pas ce que je fais'.
F
il y a tellement de parites prenantes avec des intérets diamétralement opposés, que les mesurettes qui existent aujourd'hui ne servent ... à rien ! Car elles ne sont pas appliquées. La seule solution efficace ? Une loi qui vote clairement l'interdiction dans les lieux publics.<br /> <br /> J'en parle facilement, parce que fumeur moi même. <br /> <br /> Même dans le cadre de mon boulot, en essayant de gérer au mieux l'ensemble des personnes, on s'apercoit que ca n'est pas simple : les "crises" reviennent quoi qu'il arrive de manière cyclique ...<br /> <br /> Des restos fumeurs et des restos non fumeurs ?? Je suis pas sur que ca marche ... En regle générale, quand on montre les individus les uns contre les autres, ca fonctionne rarement. <br /> <br /> Mieux vaut un texte de loi appliqué, et identique pour tout le monde. En plus, ca m'aidera à baisser un peu ma conso .....
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